Qu'est ce que la modélisation physique?
La modélisation physique est une nouvelle et passionnante méthode de synthèse sonore, offrant un énorme potentiel autant pour le musicien qui recherche la plus convaincante émulation de la réalité sonore, que pour le musicien qui recherche des sons inédits. Techniquement parlant, la modélisation physique est un algorithme complexe utilisé pour décrire le comportement sonore d'un instrument acoustique.

Nous entendons par modèle le programme qui définit un objet susceptible de vibrer, et physique dans le sens ou il décrit physiquement l'objet, les matériaux qui le composent (bois de telle densité, de telle élasticité) et les lois qui régissent le monde dans le quel il va rentrer en vibration (pesanteur, température, pression atmosphérique).

Les prémices de la modélisation débutent au début des années 70, au moment où des ingénieurs ont commencé à jouer avec des filtres numériques, ingrédient principal de la modélisation acoustique par guides d'ondes. Cette technologie a commencé à mûrir au début des années 80, avec les travaux célèbres -tout du moins pour les musiciens- sur le modèle économique en calcul de cordes pincées Karplus/Strong.

En quoi est-ce vraiment intéressant?
Son approche diffère de toutes les autres synthèses connues à ce jour. Elle offre notamment au musicien un potentiel de contrôle indisponible à travers les traditionnelles méthodes de synthèses sonores. Un instrument modélisé sait réagir à la performance gestuelle du musicien de la même manière que son homologue acoustique.

Les instruments synthétiques traditionnels peuvent être conçu pour imiter ce comportement. Cependant, les subtiles interprétations comme les nuances tonales, les changements de timbre dans le vibrato sont difficiles à accomplir en temps réels de façon convaincante. En fait, intégrer la modélisation physique dans un instrument le rend entiérement, et pour la première fois dans l'histoire de la synthése, interactif.

L'interactivité est le Graal des musiciens recherchant plus de contrôle d'expression. Mais une telle possibilité à un prix. La modélisation physique prend du temps à être apprise, et maîtrisée. Comme dans la vraie vie, personne n'est capable de prendre un saxophone modélisé sans un apprentissage du contrôle de l'embouchure, du souffle, des articulations. Sans cet effort, le musicien aura l'air d'un débutant saxophoniste.

Un saxophone modélisé sonnera infiniment mieux qu'un sample, parce que l'échantillonnage ne prend pas en compte l'évolution sonore du sax. En vérité, ce qui caractérise un son de sax, plus que le timbre lui-même, c'est la manipulation du timbre et le comportement de l'instrument. Le timbre est différent d'une octave à l'autre, change par rapport à l'attaque : Il y a autant de sonorité de saxophone qu'il y a de musiciens ou d'embouchures.La modélisation acoustique est habilitée à reproduire, en temps réel, toutes ces variables.

Comment construire une modélisation physique?
La modélisation peut-être scindée en 5 parties :
1- Un diagramme de l'instrument est dessiné. A partir de quoi, un designer va créer une représentation précise de chaque part du schéma.
2- Les particularités significatives et les caractéristiques de l'instrument sont analysées. Dans le cas de la clarinette, ça s'apparente à mesurer la taille du tuyau, l'évasement du pavillon, l'espacement entre les trous, la position et la taille de l'anche, sa flexibilité...
3- Une liste détaillée du spectre et de la réponse en fréquence est étudiée. A ce point, un livre sur la physique générale peut être utile. Une analyse informatique du timbre est aussi la bienvenue. Il existe même des programmes qui convertissent ces résultats en coefficients de filtres qui peuvent être insérés dans l'algorithme.
4- Ensuite, les principes généraux du fonctionnement de l'instrument sont étudiés. Par exemple, quelle pression d'air est requise afin de faire vibrer l'anche de la clarinette ? Comment l'évasement du pavillon affecte-t-il le timbre ? Le son provient-il du pavillon, ou directement de l'anche ? Y a-t-il du bruit dans le timbre? Si oui, provient-il du pavillon, des orifices, de la bouche, ou de tout en même temps?
5- Le jeu, la performance est analysée. Cela implique l'étude de l'embouchure du musicien, qu'est ce qui arrive lorsque l'anche est mordue, quels sont le rôle de la langue et des lèvres dans le jeu...D'autres facteurs incluent l'action des clés, comment les ouvertures des trous affectent le timbre, la tonalité, qu'est ce qui se passe quand le joueur souffle fort, ou doucement...Le but est de produire une modélisation qui soit aussi expressive que le modèle acoustique. C'est pourquoi il est important de détailler les plus subtiles nuances de jeu.
Et après?
Une fois que toutes ces informations sont collectées, un outil de développement est requis, comme par exemple le SynthKit Algorithm Design Tool. Ce logiciel fut développé pour le R&D de la platforme Oasys de Korg en Californie, et tourne sur Mac. Pour plus de réalisme, chaque partie de la clarinette est représentée par son propre guide d'ondes. Chacune de ces parties réagit de manière réaliste avec les autres. Pour le corps, un seul guide d'onde est requis, car mathématiquement, il est assez simple. Pour le pavillon, conique, c'est plus compliqué et ça nécessite plus de guides d'ondes pour le modéliser de façon convaincante, et donc plus de puissances processeur.

Les designers ont trouvé un moyen beaucoup plus économique d'accomplir la même fonction. Comme la fonction principale du pavillon est un filtre passe-bas, et bien, une filtre passe-bas est employé, éliminant du coup 4 à 6 guide d'ondes.

Ca a l'air super compliqué.
En fait, ça l'est. Mais n'importe quel musicien qui a un peu de temps pour apprendre les concepts de base de la modélisation, et qui pratique un instrument modélisé peut en tirer d'énormes bénéfices.

Virtuellement, tous les instruments modélisés peuvent être scindés en deux sections :

La partie excitation est utilisée pour simuler un modèle commençant à produire du son. Sur la clarinette, c'est l'anche. Par nature, l'instrument à vent répond à la pression de l'air et à l'embouchure du musicien dans le temps. Donc la partie excitation de ces modèles est toujours programmée grâce à des fonctions non linéaires. Cela permet au designer d'imiter et de répondre aux changements continuels qui sont produit par le musicien.
La seconde partie est le résonateur, utilisé pour modéliser le corps de l'instrument. Dans notre clarinette, c'est le tuyau central, qui peut-être modélisé par une ligne de délais bidirectionnelle, le guide d'ondes. Construire le résonateur est primordial car il détermine le timbre général de l'instrument. C'est là où intervient la recherche sur le spectre de l'instrument, ce qui permet d'obtenir une image détaillée des formants. Les formants se trouvent au niveau du pique résonnant de la réponse en fréquence de l'instrument. Différentes tailles de corps produisent différents ensembles de formants.
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